Quand le ciel est gris, le soleil n'a pas disparu pour autant
Sociologie clinique
La prise en compte de la souffrance sociale
Refusant les cloisonnements disciplinaires dans les sciences sociales et humaines, Vincent de Gaulejac a développé la sociologie clinique dans les années 90. Elle prend appui sur la méthodologie des récits de vie et s’intéresse à la souffrance sociale. Elle considère en effet que certains conflits existentiels ont leurs causes dans l’articulation de facteurs sociaux et psychologiques.
L’hypothèse, sur laquelle repose cette approche, est que l’individu est le produit d’une histoire dont il cherche à devenir le sujet.
Pour en savoir davantage: dans la préface de son livre « La névrose de classe » (juin 1999) nous pouvons lire ceci :« Dans les sociétés hypermodernes, les classes sociales semblent moins visibles parce que moins définitivement installées. Cela ne supprime pas pour autant les processus de domination entre groupes sociaux et les mécanismes de reproduction. Bien au contraire, la précarité professionnelle et la vulnérabilité sociale accentuent les processus d’invalidation des plus démunis et l’intériorisation de sentiments d’infériorité pour ceux qui ne correspondent pas à l’image de réussite que la société propose comme idéal. On voit se développer des maladies de l’excellence et des maladies de l’exclusion. D’un côté le stress et de l’autre la honte. Dans les deux cas l’interpénétration entre les phénomènes sociaux et leurs répercussions psychiquesont fortes. Plus les sociétés se développent et plus les tensions sont fortes. »
Par ailleurs, « les contradictions sociales traversent les histoires familiales et personnelles. Elles sont une composante majeure dans la genèse des conflits psychiques. Lorsque les phénomènes de promotion et de régression sociale se développent de façon rapide et importante, les individus sont confrontés à des conflits d’identité qui ont des aspects économiques, sociaux, culturels, familiaux et psychologiques »
Enfin, si les niveaux individuels, familiaux et socio-économiques correspondent à des réalités différentes, elles n’en sont pas moins interdépendantes. « La société et la famille canalisent les désirs, imposent des interdits, proposent des idéaux collectifs, des modèles d’identification, des systèmes de valeurs et de normes. Autant d’éléments qui influencent la psychologie consciente et inconsciente de ses membres. Inversement, les individus contribuent à produire des systèmes sociaux et des systèmes familiaux qui répondent à leurs aspirations et sont en concordance avec leur personnalité. C’est donc la combinaison de ces différents registres et l’analyse de leur articulation qui est vraiment explicative »